FACING BRUSSELS/MOMENTS CAPITAUX – Passeport social

Les festivités sont un révélateur de nous-mêmes. Ressortissants d’un pays qui fête une victoire olympique, parents imaginaires d’une équipe de foot nationale qui gagne. (Arrière-)petits-enfants de tel ou tel prophète, fidèle d’une religion ou d’un culte qui se prétendent supérieurs.

Elles nous présentent comme des musulmans, qui célèbrent la circoncision de leurs fils au cours de festivités qui laisseront un souvenir impérissable à toutes les personnes présentes. Elles nous confirment dans notre identité de chrétiens, qui louvoient entre vendredi saint, dinde de Noël, agneau pascal et branches de buis bénit.

Bruxelles les subit toutes. Ou presque. Les traditions, les fêtes nationales, joyeuses ou malheureuses, et dans la plupart des cas, les événements historiques un peu sacrés qui ne sont pas fêtés ici, peu importe quand et où ils se sont déroulés.

Il est à espérer que les fêtes fédèrent les individus, qu’elles dépassent les clivages des races, des nationalités, des idéologies ou de la foi. Espérer.

Ce que nous fêtons et la façon dont nous le faisons sont comme un passeport social. Ils nous cataloguent, nous font revenir en arrière, à une époque passée, où il fallait encore poser des choix individuels conscients, aux communautés dont nous sommes originaires, que notre loyauté actuelle envers elles soit grande ou non.

Ce qui incite les uns à se réjouir et à s’affirmer, suscitera souvent le mécontentement des autres.

Il suffit d’écouter les commentaires désobligeants des autochtones à l’encontre de leurs collègues qui pratiquent le ramadan. La mauvaise humeur des fumeurs qui doivent s’abstenir temporairement de leur cigarette, la fatigue perpétuelle, l’augmentation de l’absentéisme. Interrogez les homos et les lesbiennes qui se disent oui à l’hôtel de ville. Souvent, leur cortège qui traverse les petites rues est hué par des jeunes désœuvrés à l’esprit étroit.

Voyez le désespoir et la soumission dans les églises messianiques et lisez les études sociologiques sur ces formes intolérables de manipulation et de charlatanisme. Captez l’humeur de la rue: chaque fois que le ballon rond monopolise le petit écran et les pensées de millions de spectateurs, les coups de klaxon de joie des uns valent aux autres des nuits blanches et des frustrations.

Bruxelles est de toutes les célébrations, sous la pluie, dans le brouillard, sous la neige, le soleil ou la grêle. Aucun mystère ne nous est épargné. Les familles, les clubs, les quartiers, les communautés font la fête. Ils le font chacun dans leur coin, à côté, tout contre mais jamais ensemble. En râlant sur les autres.

Bruxelles fait la fête, mais si rarement comme Zinneke, ensemble. Mon Zinneke, ton Zinneke, le nôtre. Une parade au cœur à cœur, par la ville et à travers elle. Une fête du Bruxelles dont nous rêvons.